Cher lecteur,
Ecrire cette news de février est difficile pour moi.
Je me demande quel ton adopter afin qu’il ne soit ni, à tort, mélodramatique ni, faussement, optimiste.
La réalité étant que je me trouve dans un « pays » que je connais peu et qu’il m’est donc difficile de décrire.
Rappelons-nous.
En janvier je vous évoquais un possible nouveau traitement à Rennes mais les examens complémentaires que j’ai dû y subir, pour confirmer la compatibilité des soins avec mon type de cancer, ont révélé une mauvaise nouvelle.
Non seulement le cancer a profité de mes 2 tout petits mois de pause de traitement pour flamber à nouveau dans le foie, mais il est parti s’installer sur l’os de la hanche et possiblement sur des vertèbres.
Quand l’oncologue de Rennes m’a téléphoné pour m’annoncer, avec beaucoup de délicatesse, cette nouvelle, le coup fut rude, très rude, vous vous en doutez. Toute la famille est terriblement choquée.
J’ai commencé par me dire « stop, j’arrête tout, 4 ans de soins c’est assez » et 2 jours plus tard, bizarrement, je me suis sentie « retournée comme une crêpe », une petite voix m’a soufflé à l’oreille : « ce n’est pas l’heure, continue ».
Pendant ces 2 jours j’ai revu tous les patients que j’avais accompagnés et qui sont décédés sans que l’on comprenne vraiment ce qui se passait. On les sentait nous « échapper ». J’appréhende mieux maintenant ces mécanismes. De là où ils sont, qu’ils me pardonnent, je n’ai pas su trouver la clé de leur cœur meurtri. D’ailleurs, pour certains, fallait-il que je la trouve ?
Aujourd’hui quand mon oncologue me demande comment je vais, je lui réponds : « j’ai l’impression d’avoir des centaines de personnes qui me poussent par derrière en me disant : « allez, avance, encore un pas, courage, on est là » et des centaines d’autres qui me tirent par devant en me disant « viens, continue la route, nous sommes avec toi ».
J’ai repris la chimiothérapie en urgence. Je suis épuisée, physiquement épuisée. Cette reprise est une épreuve. Je reste la plupart du temps dans mon lit, c’est le seul lieu où je ne pompe pas sur mes si faibles ressources.
Rassurez-vous, je n’ai aucune douleur physique, ouf ! À chaque fois que je marche, je m’émerveille de savoir me mouvoir en toute facilité.
J’ai aussi la chance d’avoir une famille merveilleuse, vous le savez.
Alors, dans quel pays suis-je ?
J’ai beaucoup d’émotions : de tristesse, peu de colère, souvent de gratitude et je négocie avec la peur.
La joie ? Malgré ce que je vous ai écrit dans ma nouvelle rubrique sur le blog « ma chronique du moment », la joie spontanée m’a quittée, l’autre, celle qui vient du plus profond de notre être spirituel, cette joie-là ne s’est pas encore dévoilée.
Quand je suis dans une grande fatigue, je me « baigne », symboliquement, le plus souvent possible dans l’amour divin, dans le regard de l’énergie divine. Cela m’est très apaisant, j’apprends à laisser mon histoire se construire, à faire confiance. A ne rien vouloir d’autre que le Divin en moi. Ne pas m’accrocher au passé et même à l’instant. Laisser la vie trouver son chemin en moi.
Je passe aussi beaucoup de temps à apaiser mon histoire et pour l’instant, à me montrer, auprès de ma fratrie, vulnérable et sans culpabilité de cela.
Je ne sais pas encore vous décrire autrement ce nouveau pays.
Certains d’entre vous me trouveront « bizarre », ce n’est pas important, je témoigne, chacun a droit à sa propre foi.
En mars, je saurai vite si la chimio, grâce à je ne sais quelle magie, la vôtre peut-être, a un effet positif sur le cancer.
Lecteur, si comme moi, tu traverses les contrées du cancer, sache que je suis là, à ma façon. Je pense souvent à toi, même si je ne te connais pas car nous faisons tous partie d’une même chaîne d’amitié, de tendresse et de soutien.
Et vous tous, lecteurs, voyez le meilleur pour moi, envoyez-moi de la douce lumière, ayez, ayons foi que c’est le meilleur qui arrive.
Regarde, le printemps s’annonce.
Sourions à la vie puisque nous sommes en vie.
Je t’embrasse,
Cécile